Critique ciné : Hunger Games

Avouez-le, en voyant les bande-annonces de "Hunger Games" vous vous êtes dit : Tiens, ils ont fait un remake américain de "Battle Royale" ? Sauf que non, "Hunger Games" est l'adaptation du premier volume de la trilogie littéraire du même nom qui a été écrite par une certaine Suzanne Collins de 2008 à 2010. Et cette dernière jure n'avoir jamais entendu parler de "Battle Royale" (le livre de 1999 ou le film de 2000) avant de publier ses propres livres.

OK, admettons, après tout il y avait déjà eu les célèbres romans de Stephen King "Running Man" (1982, puis adapté au cinéma en 1987) et "Marche Ou Crève" (1979) qui traitaient plus ou moins du même sujet sauf qu'il n'y était pas question d'enfants, donc pourquoi pas une nouvelle variation sur ce thème cruel ?


L'histoire : dans la nation de Panem, les 12 districts défavorisés doivent chaque année offrir 2 de leurs enfants (par tirage au sort ou volontariat) à la riche cité du Capitole afin qu'ils participent aux "Hunger Games", un combat à mort en pleine nature retransmis à la télévision où il ne peut y avoir qu'un seul vainqueur ! La jeune Katniss Everdeen du district 12 est prête à tout pour protéger sa petite sœur Primrose qui participe pour la première fois au tirage au sort...

L'un des éléments les plus marquants du début du film est la grande différence visuelle qui sépare les habitants du district 12 de la cité du Capitole : si les uns semblent vivre dans une cité ouvrière qui n'aurait pas beaucoup changé depuis la fin du 19ème siècle, les autres vivent dans le luxe et la technologie omniprésente tout en arborant des tenues si extravagantes qu'elles tombent la plupart du temps dans le ridicule le plus complet. Le concept est intéressant, mais à l'écran la différence visuelle est si grande qu'on a l'impression que les designers ont été se servir dans des costumes et des décors existants déjà créés pour d'autres films, sans le moindre souci d'homogénéité... sans parler du fait que les participants des "Hunger Games" portent des tenues "casual" et actuelles relativement classiques une fois que les jeux ont commencé, tandis que les policiers arborent un style science-fiction terriblement "old-school" qui rappelle un peu celui des forces de l'ordre du "THX 1138" (1971) de George Lucas.

Je n'ai rien contre les films aux visuels extravagants mais ici le mélange des genres est particulièrement maladroit et gratuit vu qu'en plus on ne sait absolument pas pourquoi il existe de telles différences entre toutes ces catégories sociales de la population. Un ratage donc, qui heureusement s'estompe lorsqu'on est plongés dans les "Hunger Games" où les participants portent des tenues assez communes finalement...

(Une version féminine de THX 1138 ? Non non...)

Sauf qu'ils se font longuement attendre ces fameux "Hunger Games" ! OK, l'univers dans lequel se déroule cette histoire est assez particulier et mérite d'être présenté au spectateur. Mais le film dure un peu plus de 2H20, et les "Hunger Games" ne commencent véritablement qu'au bout d'une bonne heure de métrage, et on finit par se rendre compte que toute la longue introduction ne répond absolument pas aux questions qu'on est en droit de se poser. On y multiplie plutôt les longues séquences de préparation par le biais de dialogues expliquant les stratégies à appliquer en termes de survie et de support publicitaire... des éléments qui n'auront finalement que peu d'importance une fois que les jeux auront commencé ! Heureusement, il y a aussi quelques (inévitables) scènes de préparation physique, mais encore une fois, à bien y réfléchir, celles-ci n'ont guère d'impact et on y apprend encore moins de choses que dans la plupart des dialogues.

Malheureusement, les longueurs persistent une fois que l'action débute pour de bon, plombant ainsi l'ensemble du film par un rythme mal équilibré qui a du mal à tenir le spectateur en haleine. D'ailleurs, même la plupart des scènes d'action sont complètement torpillées par d'inutiles effets de style (ralentis, disparition du son, plans saccadés, etc...) supposés nous faire ressentir le stress des personnages mais qui finalement ne font que maintenir le spectateur hors de ce qui se passe à l'écran. Du coup, à cause de cette mauvaise introduction et de cette mauvaise façon de gérer les scènes d'action, on ne ressent pas la moindre empathie pour ces adolescents amenés à commettre ou subir des actes bien éloignés des occupations normales de gens de cette tranche d'âge. On se moque donc pas mal des jeunes tués au cours de ces jeux cruels, à tel point qu'on se prend à espérer que la prochaine scène tienne ses promesses en termes de violence, parce-qu'après tout le concept même des "Hunger Games" est particulièrement violent !

(Elle est bien mignonne la petite Jennifer Lawrence, mais est-ce suffisant ?)

Or, de la violence, il n'y en a finalement pas tant que ça dans ce film, comme si on hésitait à aller au bout du concept ! Et vu qu'on n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent en termes de background politico-social, ni en termes d'action pure, peut-être peut-on se rattraper avec la psychologie torturée des jeunes gens confrontés à ces événements terribles ? Que nenni ! Quasiment toute l'histoire se déroule du point de vue de Katniss Everdeen (Jennifer Lawrence, déjà vue en blonde dans le rôle de la jeune Mystique dans "X-Men - Le Commencement"), or celle-ci reste souvent impassible face aux événements, du coup on a du mal à savoir si elle est très sûre d'elle, juste stressée ou même si elle se fout complètement de ce qui lui arrive. C'est gênant pour se faire une opinion ! Le jeu de Jennifer Lawrence n'est pas mauvais, mais encore une fois la direction choisie par le film a tendance à laisser de côté le spectateur. Ça commence à faire beaucoup !

Les acteurs sont plutôt bons d'ailleurs ! La plupart des adultes sont interprétés par des acteurs déjà assez connus. Donald Sutherland, Woody Harrelson, Stanley Tucci et même Elizabeth Banks (la sympathique secrétaire Betty Brant du Daily Bugle dans la trilogie "Spider-Man", entre autres nombreux rôles plus ou moins importants), totalement méconnaissable sous son maquillage et ses costumes incroyables, ils sont tous assez justes dans leurs rôles respectifs. Même le chanteur Lenny Kravitz s'en sort très bien dans son rôle d'artiste costumier, mais en revanche on se demande ce qu'il est venu faire là...
Les jeunes acteurs, moins connus, ne se débrouillent pas trop mal, même s'ils ont tendance à être un peu trop stéréotypés (comprenez : un peu trop beaux), voire même un peu caricaturaux en ce qui concerne les plus méchants.
Le seul qui fait tache, c'est Wes Bentley dans le rôle d'un jeune producteur aux dents longues. Ses grands yeux bleus d'ahuri et sa fausse barbe taillée d'une manière incroyable ne l'aident pas à rendre son personnage crédible, pas plus que son jeu d'acteur d'ailleurs ! Étrange pour ce comédien qui a déjà été capable du meilleur (le jeune voisin dealer et cinéaste amateur dans "American Beauty" en 1999) comme du pire (Blackheart, l'un des plus mauvais méchants de l'histoire du cinéma dans la première adaptation du comics "Ghost Rider" en 2007).



"Hunger Games" est un véritable festival de promesses non-tenues ! Des longueurs, peu d'action, encore moins de violence, aucune réflexion sur une situation qu'on nous explique à peine, des rebondissements maladroits et prévisibles, un univers visuel sans la moindre cohérence, etc... Pourtant, pas mal de sujets intéressants sont évoqués dans la première partie du film ! Mais ils sont finalement peu développés, voire même plus du tout évoqués par la suite.
Les jeunes participants de ce jeu cruel ne semblent jamais réellement en danger, ne souffrent jamais de la faim, et se débrouillent même plutôt très bien lorsqu'ils sont livrés à eux-mêmes en pleine nature. Crédibilité = 0 % !!! Comme si le sujet du film ne s'assumait pas lui-même...
Bref, "Hunger Games" n'est qu'une sous-copie à l'eau de rose du grand "Battle Royale" ! N'ayant pas lu les bouquins, je ne saurai expliquer ce qui a fait le succès de la trilogie littéraire. Une preuve supplémentaire qu'un grand livre (en admettant que ça en soit un !) ne fait pas forcément un grand film...

Difficile d'imaginer qui pourrait trouver son compte dans ce gâchis, à part des adolescents ultra-sensibles en quête de romances simplistes ! Et encore...

Quand je pense que le second film est déjà en préparation !

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