Critique ciné (+ podcast 24FPS) : Gatsby Le Magnifique

Autant le dire tout de suite : je suis loin d'être un grand fan des films réalisés par Baz Luhrmann ! Je n'ai pas vu son premier film australien nommé "Ballroom Dancing" (1992). Et je n'ai vu que tout récemment son fameux "Romeo + Juliette" (1996) qui avait fait tant de bruit lors de sa sortie avec un jeune Leonaro DiCaprio au tout début de sa période d'idole des adolescentes. Je veux bien croire que l'approche de Luhrmann par rapport à l'œuvre de Shakespeare était très originale à l'époque mais je trouve que ce film a très mal vieilli et s'avère extrêmement difficile à regarder et à supporter aujourd'hui. Puis il y a eu "Moulin Rouge" (2001) que je n'ai également vu pour la première fois que tout récemment, et même si l'aspect visuel s'avère bien plus réussi et abouti que dans son film précédent, j'ai tout de même dû me faire violence pour aller au bout de cette comédie musicale excentrique, surjouée et possédant de trop nombreuses fautes de goût en termes de mise en scène. J'ai également fait l'impasse sur "Australia" (2008) lors de sa sortie et j'avoue ne pas avoir le courage de le voir maintenant...

C'est donc avec de grandes craintes que j'appréhendais son nouveau film "Gatsby Le Magnifique", inspiré du roman du même nom sorti en 1925 qui a déjà connu diverses adaptations au cinéma dont une très célèbre en 1974 avec Robert Redford et Mia Farrow dans les rôles principaux. Ce film d'il y a quasiment 40 ans est d'ailleurs très surestimé à mon goût et j'ai encore du mal à croire qu'on ait pu penser que c'était un bon film lors de sa sortie quand on voit à quel point la réalisation, la photographie et le jeu des acteurs (sauf Redford !) était lamentables, même pour l'époque...


L'histoire : Nick Carraway vient à New-York en 1922 pour travailler à Wall Street et être témoin de la folie qui caractérise cette période en pleine expansion économique. Nick a enfin l'occasion de revoir sa cousine Daisy qui est désormais mariée à son vieil ami Tom, tandis que son voisin, le mystérieux Gatsby, organise régulièrement des fêtes somptueuses dans sa grande demeure...

Je vais tout de suite m'exprimer sur le scénario de "Gatsby Le Magnifique" (aussi bien le livre que les films) : je trouve cette histoire pathétique et totalement sans intérêt. Le livre avait d'ailleurs été un échec lors de sa sortie et il ne s'en était vendu que 25 000 exemplaires lors du décès de son auteur F. Scott Fitzgerald en 1940. Ce n'est qu'après la seconde guerre mondiale, où plus de 155 000 exemplaires avaient été distribués aux soldats américains, que le livre est devenu un classique, notamment parce-qu'il décrivait une époque décadente et exubérante à laquelle la crise financière de 1929 avait mis fin de façon brutale. Mais la romance qui est au cœur de cette histoire de nouveaux riches et de familles prestigieuses n'a, elle, pas le moindre intérêt ! Comment peut-on se prendre de passion pour des gens aussi détestables et dénués de moralité ? Comment peut-on croire que l'insupportable et éthérée Daisy (Carey Mulligan, au jeu toujours aussi monotone et mono-expression) puisse être l'objet de tant de convoitise ? Comment peut-on avoir la moindre compassion pour ce gros salopard de Tom (Joel Edgerton, au physique impressionnant) et sa maîtresse arrogante et prétentieuse Myrtle (Isla Fisher) ? Comment peut-on croire une seule seconde que Nick (Tobey Maguire), le narrateur de cette histoire, reste aussi impassible et dénué de réaction, devant toutes ces histoires de mensonges et de coucheries entre gens dont il est supposé être proche ? Seule la jolie Jordan Baker (Elizabeth Debicki) semble être un personnage intéressant puisqu'elle n'a aucun parti-pris, sauf que son rôle est quasiment réduit à néant comparé au roman d'origine et qu'elle se contente elle-aussi de n'être qu'une observatrice passive et encore plus inutile que Nick puisque lui au moins est là pour raconter l'histoire.

Enfin, comment peut-on admirer un personnage aussi mystérieux et intriguant que Gatsby (Leonardo DiCaprio, excellent dans son rôle, comme toujours) qui, après avoir été construit de manière plutôt intéressante pendant les 3/4 du film, finit par s'effondrer totalement dans la dernière partie de cette histoire pour devenir aussi idiot et détestable que les autres personnages ? Non, vraiment je ne vois pas, il n'y a aucune bonne manière de raconter une histoire aussi naze...

(Voilà tout ce qui intéresse vraiment Baz Luhrmann...)

Dans ce cas, le seul élément susceptible de sauver ce "Gatsby Le Magnifique" reste la mise en scène particulière de Baz Luhrmann, mais sachant que c'était ce que j'avais principalement détesté dans ses films précédents, j'étais particulièrement méfiant à ce sujet. Pourtant, c'est de là qu'est venue la bonne surprise de ce film : son aspect visuel ! Les décors, les costumes et les lumières sont particulièrement réussis, même s'ils sont légèrement trop "flashy" par rapport à ce devrait être un film d'époque. Mais les seules réelles fautes de goût visuelles ne surviennent que lors des plans aux décors entièrement réalisés en images de synthèse. Ils n'ont parfois aucun sens, surtout quand il ne s'agit que de dialogues, et sont beaucoup trop nerveux (et factices) pour les scènes en voiture qui ne méritaient pas tant de surenchère visuelle. Mais on sent que Luhrmann prend énormément de plaisir à mettre en scène les fêtes et les danses de ces années folles, et on se prend à penser que c'est la seule chose qui l'intéressait vraiment lorsqu'il a commencé à travailler sur ce projet. Dès qu'une scène se déroule lors d'une fête (et il y en heureusement plusieurs), le film gagne soudainement en rythme et en richesse, à tel point que ces passages sont régulièrement coupés par des moments de fête, même en plein milieu des dialogues, afin que Baz Luhrmann puisse bien montrer à quel point il kiffe de mettre en scène ces moments-là !

N'oublions pas de mentionner la musique du film, complètement hors-sujet (c'est une habitude chez Luhrmann) la plupart du temps, même si le morceau de Lana Del Rey et la production globale de Jay-Z tentent de se rapprocher régulièrement des sonorités jazzy de l'époque. Cela plaira sans doute aux fans des artistes présents sur la bande-originale du film, et exaspèrera les autres...



"Gatsby Le Magnifique" est en quelque-sorte fidèle à l'époque décadente où se déroule l'histoire : tout est très beau et très enjoué en apparence, mais ça s'effondre si on gratte un peu et que l'on réfléchit à ce qui est vraiment en train de se passer ! L'ensemble se laisse regarder grâce à sa richesse visuelle et l'énergie présente lors des scènes festives, mais le tout reste franchement dénué de profondeur et surtout d'émotions, ce qui est très gênant pour une histoire qui est supposée être une romance avant-tout, mais à laquelle il est extrêmement difficile d'adhérer. On restera également sur sa faim en ce qui concerne l'un des lieux les plus intéressants de ce film : la "vallée des cendres", très sale et très sombre, mais qu'on ne voit finalement pas tant que ça, et le garagiste Wilson, son personnage principal, qui est après tout la seule véritable victime de cette histoire...

Bien entendu, cette critique écrite est dénuée de spoilers qui pourraient vous gâcher la surprise du film, mais peut-être que vous savez maintenant que dans le podcast audio 24FPS, je vais beaucoup plus loin dans ma critique puisque la seconde partie de l'émission est consacrée au décryptage de toutes les scènes du film qui y est traité. La première partie, elle, est dénuée de spoiler mais regorge d'informations sur le film et ses origines, et elle peut être écoutée sans avoir vu le long-métrage en question. Alors si ça vous dit d'écouter cet épisode entièrement consacré à "Gatsby Le Magnifique", il vous suffit de cliquer sur l'image ci-dessous afin de l'écouter en streaming, de le télécharger au format mp3 ou même de vous y abonner via RSS ou iTunes :

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